Ombres de la catholicité et gloire de Lancelot !
Réflexions (avant dernière de la série) sur une excursion de l’été en Normandie-Maine
De notre rapide circumambulation sur les terres de Lancelot nous ressortons avec un constat fort, mais aussi protéiforme. Avec force nous avons constaté que bien plus qu’à la découverte d’un substrat, ce territoire invite à la lecture de mythes vivaces et de légendes actives. Une mytho-réalité si palpable qu’il est possible d’y vivre ce qu’en tradition on nomme l’Aventure Merveilleuse, pour peu que l’on sache reconnaître l’entrée de cette « gaste forêt » de symboles. Oui ! En ces terres de Normandie-Maine, la matière « graalique » palpite et nous relie à une foule d’êtres, femmes et hommes, savants, pèlerins, entités mythologiques, d’un passé récent ou lointain, qui témoignent de ce qu’ils perçurent, eux aussi, de traces semées ici depuis la plus haute antiquité. Magnifique Lac d’Amour !
En Normandie-Maine, « Brocéliande » (et elle peut prendre d’autres noms) se manifeste à ceux dont le cœur dilaté, espère en la transcendance et l’humanité, promesse d’une couronne à saisir en juste temps !
De notre constat, riche en rêveries mais lacunaire en connaissances objectives car il nous reste tant à percevoir, nous pouvons offrir quelques éclats, tous aperçus en cette Brocéliande, mais suffisamment persistants en notre mémoire, pour en être passionné. C’est en cela que notre constat est protéiforme.
En Normandie-Maine donc, si les merveilles qui inspirèrent Chrétien de Troyes sont toujours palpables, cela est dû en partie à l’action de nombreux[1] esprits éclairés, principalement catholiques, qui prirent grand soin des trésors architecturaux médiévaux et antiques. Ces esprits éclairés œuvrèrent aussi à l’édification et l’embellissement d’une foule de monuments, églises, chapelles, cathédrales, et un océan d’objets d’arts et de littérature. Ceci est, jusqu’au paradoxe ! Il est curieux de constater que pour bien lire cette multitude d’œuvres, dont l’essentiel date de la fin du 19e siècle, il est bon de se munir de connaissances particulières, dont le livre d’Emile Mâle, « La fin du Paganisme en Gaule et les plus anciennes Basiliques Chrétiennes » est une parfaite synthèse. De nombreux monuments de cette région, par leurs savants agencements, semblent démontrer que leurs maîtres d’œuvre disposaient de connaissances approfondies sur ce qu’était l’art Chrétien des tout premiers siècles. Des connaissances qui semblent à la pointe de celles que l’on méditait ailleurs en France et en divers points du globe. Pour évaluer cela de manière positive, je crois qu’une étude précise et particulière de l’architecture de l’église Saint-Julien de Domfront ou de l’oratoire de Passais, donnerait bien des lumières. Je pressens aussi qu’il serait bon de se plonger dans l’histoire de la Thébaïde du Maine (Le Montaigu) et l’œuvre de l’abbé Angot et ses polémiques sur les origines d’une certaine famille de la région.
La question qui vient alors immédiatement est de se demander si ces « esprits éclairés »œuvraient en conscience de ce que le substrat mythologique régional avait inspiré comme souffle spirituel et littéraire à l’imaginaire Arthurien et à Chrétien de Troyes en particulier ? C’est une question que l’on peut se poser et dont il sera difficile de faire l’étude. Ces esprits catholiques dont il est question, tout imprégnés de leur temps, cherchaient surtout à refonder solidement les valeurs chrétiennes qu’ils pensaient en danger. Une réaction un peu folle que l’on observe dès la fin du 18e siècle à travers toute l’Europe… Et dont les braises, encore vive, du fanatisme des guerres de religions furent le lit pour de nouvelles tortures. Un mouvement de réaction bien connu, qui témoigne surtout de sa parfaite incompréhension des idéaux de liberté, d’égalité et de fraternité nés de la révolution française qu’il eut été plus judicieux d’accompagner que de combattre. Peut-on combattre l’énergie du vivant ? Il est vrai que ces idéaux, en s’incarnant dans la République, ne cessèrent de rogner la toute puissance temporelle de l’église catholique. Cette peur, née de l’appauvrissement de son pouvoir temporel, suscita donc cette farouche volonté de refondation du catholicisme qui ne voyait, par ailleurs, de salut temporel, que par la « royauté » dynastique, oubliant le sens réel et spirituel de la couronne éternelle ! Coupable aveuglement qui œuvre toujours à la décadence du christianisme en occident ! Cette réaction mobilisa de puissantes énergies en ce territoire de Maine-Normandie. Dans le but, donc, de ressourcer la catholicité, de brillants esprits catholiques se mirent alors en quête de ce que fut le christianisme des premiers temps en ce territoire enchanté que l’on sait aujourd’hui, mystagogiquement dédié à Lancelot. Dans cette aventure, ils se confrontèrent aux traces de leurs aînés de la renaissance, de l’époque médiévale et du haut moyen-âge,… Traces laissées dans le sillon des récits historiques et littéraires. Ces esprits catholiques furent de puissants « ré-activateurs » des substrats antiques et médiévaux. Les traces de leur action au 18e siècle, surtout au 19e et au début du 20e sont manifestes.
Ce que je me proposerais bien d’étudier, avec d’autres, si cela inspirait quelques amis, c’est l’aspect très romanesque de cette aventure humaine en ce territoire. Un travail qui pourrait faire l’objet d’une publication collective et au moins, pour ma part, d’un récit poético-romanesque qui pourrait avoir une certaine filiation avec l’œuvre d’Anatole France…. Bref, il s’agirait de rendre compte d’un aspect de l’histoire de ces beaux esprits catholiques qui se confrontèrent à des réalités Historiques et Archéologiques dont la nature ne fut certainement pas à contenter leurs objectifs métapolitiques. Ceux qui visaient à réactiver ce qu’ils espéraient être les racines « mystagogiques » de l’intégralisme chrétien furent sans doute livrés aux paradoxes de l’étrangeté familière. Beaucoup n’eurent d’autres choix que de se réfugier dans les fantasmes nauséeux de l’intégrisme et la falsification. Ceux qui ne renoncèrent pas à l’intégralisme se découvrirent alors sur un navire sans mât, ni gouvernail. Sous le regard de Robert D’Arbrissel et de « l’Estoil Internelle », nous pouvons les imaginer en leur province et à leur niveau, dans les souffrances de dilemmes intellectuels tels qu’en connurent, à la même époque, les Prêtres archéologues de l’Ecole Biblique et Archéologique de Jérusalem… Une mise en lumière d’une aventure spirituelle et humaine dont je ne fais qu’imaginer les probables dynamiques en Normandie-Maine, mais qui a été vécue par une foule de savants et de lettrés catholiques et dont le questionnement n’a pas été étranger à des intellectuels comme le père Teilhard de Chardin. L’évaluation de l’intensité de ce moment charnière de la pensée catholique en ce territoire nous permettrait certainement d’inventorier (au moins par l’imagination) l’influence de tout un pan de ce christianisme primitif, si peu catholique ! Un christianisme primitif qui inspira, sans doute, pour une part l’imaginaire arthurien via des textes dont le plus connu est l’évangile de Nicodème. Un christianisme primitif réactivé, de manière involontaire et confuse en sa réelle substance, par les tenants de la catholicité d’alors… Nous aurions aussi tout intérêt à plonger dans les archives (aujourd’hui disponibles) de divers cercles maçonniques des hauts grades chevaleresques et chrétiens… L’une des toutes premières loges maçonniques française installée à Paris ne s’appelait t’elle pas Saint-Thomas…
Cette plongée serait aussi l’occasion d’effleurer cette « concorde » probable entre les ultimes tenants du substrat mythologique, mélancolique[2] et déjà romantique, de la culture « celto-druidique » avec ceux qui, lors des 3 premiers siècles de notre ère, se référaient à la pensée de Jésus de Nazareth. Une concorde probable, mais aujourd’hui si difficile à percevoir du fait de la domination de la vision catholique qui ne laisse entendre de ses relations aux philosophies et religions antiques que des pratiques de condamnations, d’exorcismes… Comme ces actes d’exorcismes violents attribués à saint Martin au regard de ce que l’on peut lire comme texte attribués à Sulpice Sévère… Rappelons que les moines de Saint-Benoît (86) ont mit à jour des tombes contemporaines de saint Martin, dans un enclot monastique, où cohabitent des sépultures aux artefacts religieux de type pagano-celtiques et chrétiens…
[1] Avant l’œuvre historique et archéologique refondatrice de René Bransard (+1971) et poursuivit par de nombreux chercheurs dans le sillage du Professeur Georges Bertin.
[2] Mélancolique au sens noble et romantique, car de toute l’antiquité, les plus grands esprits et parmi eux les pythagoriciens, vénéraient ce que les « druides » surent faire naître d’équilibre des pouvoirs spirituels et temporels au début du VIe et qui se poursuivit jusqu’à la fin du IIe siècle avant JC. Cet « âge d’or historique », pour beaucoup dont Poseidonios, incarnait un « retour » à l’âge d’or mythologique, ce fut une expérience spirituelle et politique qui marqua le monde antique comme un modèle à reproduire et dont la nostalgie particulière me semble se retrouver dans l’imaginaire Arthurien comme l’énergie noire agit sur le cosmos. Une mélancolie qui portait aussi l’espoir d’un possible retour de l’état d’harmonie non-dualiste, à la fois spirituel et temporel, soit l’établissement d’un royaume où les forces de transcendance seraient victorieuses, ici et maintenant. Une épopée qui nous reste offerte et possible comme la plus grande de toutes les aventures héroïques. Mais, il nous faudrait collectivement tourner le dos à cette fuite vers un ailleurs spatio-temporel d’un bonheur/paradis coincé dans un futur inaccessible et toujours promis à la prochaine apocalypse… Nous comprendrions alors que « ce que nous espérons est déjà arrivé », cette merveille qui réside en l’humanité et que les premiers témoins de Jésus de Nazareth professaient aussi (la véritable espérance !), eux qui affirmaient à la suite de saint Thomas que l’on devait « entrer vivant dans le royaume de Dieu… »
Le Roy des montagnes vides
Toi, le Roy désespéré,
Regarde en ta chair, océan dévasté,
Et pourtant miraculeux véhicule,
Regarde en ta chair, océan ignoré,
Sous tes montagnes le vide pullule
Toi, le Roy désespéré,
Regarde en ta chair, océan ignoré,
Toutes tes unions en fusion périclites,
Sans gloire, sans vision, tu persistes
Regarde en ta chair, océan malmené
Si pitoyables, si triste, méprisé
Regarde en ta chair, elle recule !
Et pourtant tu sacrifies aux rites,
Avec obstination, aveugle, tu délites
Le Sang et sa Rose, tout bascule
Tu crois vivre sans avoir à l’aimer
Tu voudrais, c’est ta bête féroce
Tu es maître du rien, rutilante farce
Tu restes gorgé de mort, mécanique, empaquetée
Dehors les montagnes vides s’affairent,
Sombres, menaçantes, ruisselantes du faire
Et tes larmes les bénissent, amantes de l’enfer
Rien sur terre ne te semble survivre aux fers
Ah, comme tu te lamentes
Tu te délectes d’ignorance
Alors qu’il suffirait de placer ton pied dans la trace
Ainsi deux font la Paix…
…Et ils diront à la montagne du vide : « éloigne-toi ! »
…Et elle s’éloignera !
De Brocéliande à Arthur et de l’Aleph-Beth…
A mes fils et au code secret offert à toute naissance !
En témoin d’un écho du passé, quelques jours auparavant, je prononçais des paroles choisies, ceci devant la cour du Roi Arthur assemblée à la Table Ronde. Une noble compagnie héritière de celle du 6e siècle, et recrée à Glastonbury au XIXe siècle.
Aux 4 vents de Brocéliande et leurs clameurs sécrètes, au creux d’un chemin du dernier carré de la forêt mystique, sur la branche d’un Rouvre, mon poème intitulé « Sous le ciel de Mélusine » fut lâché… Il l’a été où le minéral et le végétal s’épousent en un acte vertigineux. Ici l’universelle merveille se manifeste dans le « …il y-a… » Ce chemin presque oublié offre ce miracle grâce à la troublante prophétesse de Brocéliande qui fut le médium cristallisateur de cette magie naturelle, manifestation persévérante et toujours observable dans son aspect le plus concret, racines d’arbres enlaçant amoureusement leurs pierres nourricières. Un assemblage de minéraux et de végétaux, symbolisant (au moins !) le message judéo-christique nourrissant l’antique sève philosophique des druides. La prophétesse de Brocéliande, dont les ombres effraient tel l’ogre les enfants impatients et ignorants, portait le nom de Geneviève Zaepffel (1882-1971). C’est juste derrière son magnétique et ensorcelé Manoir-du-Tertre, que Geneviève, pour son grand œuvre de druidesse, consacra l’union du bois vivant à la pierre façonnée. Un geste dont la trace se lit toujours, geste de magie opérative d’une femme mystérieuse et aujourd’hui maudite. Ce qui signifie beaucoup, tant sur le plan symbolique que celui de la quintessence des organisations initiatiques qui en ont résulté. C’est là un message de Phileas Foog qu’il est donné de recueillir ! Qui en fera la moisson ? Pour faire écho à cette attente nervalienne, le 10 octobre 2015, mon poème prit donc place, humble mais juste signal de reconnaissance… Surtout ne vous empressez pas de juger la Druidesse, la Prophétesse de Brocéliande œuvrait dans l’ombre au grand mystère de l’indicible !
Ma caresse psychique à ce lieu frissonnant et particulier, fut la continuation d’un échange commencé ailleurs avec d’autres et en fraternité, une conversation improbable et merveilleuse. La dive grâce fait que le passé défile devant et l’avenir derrière. Ce que l’on prend pour un écho, n’est souvent que l’avenir du passé. Il faut entendre ce qui en diverge, ainsi le présent s’enrichit d’un parfum rédempteur.
En témoin d’un écho du passé, quelques jours au paravent, je prononçais des paroles choisies, ceci devant la cour du Roi Arthur assemblée à la Table Ronde. Une noble compagnie héritière de celle du 6e siècle, et recrée à Glastonbury au XIXe siècle. Elle tenait son cercle en Normandie pour l’équinoxe d’automne. Invité en cette chaîne fraternelle réincarnée, sublime lacet d’amour, je vis s’ouvrir scintillant, paisible et naturel, le vortex des synchronicités métapsychiques. Donc, libre de partager, il me vint le courage d’interroger l’oracle voilé. Je le fis donc, craignant tout de même ma vanité et mes prétentions face au magistral aéropage (voir mon travail lu devant l’International Order of the Knights and Ladies of the Round Table of King Arthur’s court). J’invoquai ma rencontre du Shâh-Nâme, les confrontations et complicités des traditions orales et écrites, de même des êtres passés en terres avaloniennes, un archi-Druide de la Gorsedd de Bretagne, un professeur parlant toutes les langues celtes, et le Manoir du Tertre qui m’accueilli en diverses occasions et notamment lorsque mes fils, en gestation, prenaient corps dans la matrice de leur mère. Mes jumeaux en étaient à leur 5e mois de leur vie intra-utérine et passèrent 4 fois 7 jours, en cet état, en ce haut lieu. Leur vie intra-utérine n’eut que 8 fois 4 semaines ! Mes fils, nés au Palais-Royal, sous les auspices d’une séquence cabalistique écrite en Oghame et en Hébreu, laissée à mon intention, anonymement, dans le cloitre du Palais… Une ribambelle d’histoires, une sarabande d’émotions dont le sens n’échappe pas à l’espoir, mais à la certitude, car fééries vécues, source de toutes origines. Mais je m’égare…
Hors donc, les signes se donnent hors notre volonté, ils ne réfrènent ni l’envie, ni l’oubli, ni le fantasme, parfois ils s’en inspirent. En vérité, les signes répondent aux pensées, mieux encore aux actes. Comme pour le Trivium et le Quaternum, aucune des parties n’est une tranche mais, par la grâce de ce qui nous constitue, des phases qui s’enchaînent au service de l’expansion psychique. Elles se sanctifient de reconnaissance…
Les anges souhaitaient, dans leur grande bonté, me rappeler que rien ne peut exister s’il n’est pas nommé. C’est ainsi, après mes phrases prononcées devant la cour du Roi Arthur, en circumambulation dans le dernier carré de Brocéliande, le Sepher Yetsira me tomba entre les mains alors que je flânai dans une librairie de Tréhorenteuc. Ce fameux village de Brocéliande, où l’abbé Gillard construisit son étonnante église que visitent des cohortes de touristes. Il faut bien dire qu’une étrange et faussement naïve décoration embelli cette église la rendant énigmatique. C’est juste après la deuxième guerre mondiale que l’abbé Gillard se lança, aidé d’un respectable prisonnier allemand, dans la fabrication de vitraux et de fresques où foisonnent toute la symbolique de l’imaginaire Arthurien. Ce prêtre inspiré mit à l’honneur, lui aussi, l’étonnant mariage qui uni celtisme et judéo-christianisme.
Il est dit que le Sepher Yetsira n’est pas à comprendre, il demande seulement à être reconnu. En soit, c’est un merveilleux présage qu’il me fut donné de l’acquérir en ce village de Tréhorenteuc où souffle l’esprit du Graal. Reconnaître le merveilleux lorsqu’il se présente nécessite une certaine simplicité, c’est le lion qui accompagne tout chevalier des temps aventureux lorsque, digne dans l’épreuve, il libère la force amoureuse des anges en les acceptant.
Ma question, que j’ai osé prononcer devant l’oracle voilé et véritable maître de la noble assemblée du Roi Arthur, était aussi une promesse, car si j’avais une réponse, je me suis engagé d’en offrir la quintessence lors d’une prochaine prise de parole devant la cour.
Ces mots prononcés devant la Table Ronde et ma caresse psychique sur le chemin qui frôle le Manoir du Tertre, participèrent à l’office libérateur et autorisèrent une communication particulière directe et subtile. Le verbe retentissant produit l’évènement. Ce fut au début et c’est là la structure.
A vue de l’église de l’abbé Gillard la séquence révélatrice ne faisait que commencer. Au sortir de la librairie, mon Sepher Yetsira sous le bras, sur le pas de la porte, un homme d’environ 70 ans m’attendait. Du moins semblait-il m’attendre puisse qu’il me demanda à brûle-pourpoint si j’avais un hobby ? Je lui répondais : « Je n’ai pas de hobby ou tout ce que je fais l’est ! » Satisfait de ma réponse, il se senti invité à poursuivre et donc à se présenter : « Je suis retraité du Ministère de la Recherche, physicien, j’étais aussi analyste et spécialiste de cryptographie… » Il me parla subtilement, mais avec une grande clarté induite par la maîtrise qu’il avait de son sujet : « la Kabbale » ! L’une de ses évocations les plus précieuses fut celle du « Livre de Ruth », qu’il me fit découvrir comme une clé importante de l’imaginaire Arthurien… En quelques heures ce personnage surgit comme la foudre, mit en perspective une multitude de faits et donna corps à une multitude de pistes et de portes, dont certaines susceptibles, à mes yeux, d’offrir un fleuve de réponses aux questions posées devant la cour du Roi Arthur à l’oracle voilé. Entendons bien, il ne disposait d’aucune réponse, mais savait qu’il avait à offrir le récit de sa propre expérience, témoignage d’un cheminement qui lui avait personnellement apporté certaines lumières… En cela, il se manifestait dans la logique d’un paradigme dont la vérité n’existe pas hors de la vérité. Il s’agit du paradigme qui commande notamment à tout éveil réel et toute transmission agissante. Ce paradigme, deux visions se sont conjuguées en moi pour m’en donner un aperçu ! Tout d’abord, celle furieusement active des Gathas de Zarathoustra dans la version hautement poétique de Khosro Khazai Pardis, cette vision de la tradition et de la transmission, propose l’éveille par stimulation de la pensée, ceci en élargissant et en renouvelant les points de vue sur la vie et le vécu… Et puis celle de E. Lévinas, sans doute passionnément poursuivie des enseignements de l’énigmatique Monsieur Chouchani, dont la pierre tombale a été écrite par E. Wiesel. Une vision de Levinas dont je reproduis ici les passages de son ouvrage qui en font état : « L’au-delà du verset » eux-mêmes donnés par Marc-Alain Ouaknin dans son livre : « Le livre Brûlé » : « … La Transmission est reprise, vie, intention et renouvellement, modalités sans laquelle le révélé, c’est à dire une pensée authentiquement pensée, n’est pas possible… Le vrai apprendre consiste à recevoir la leçon si profondément qu’elle se fait nécessité de se donner à l’autre : la leçon de vérité ne tient pas dans la conscience d’un seul homme, elle éclate vers autrui. »
Mes lignes versifiées à la rencontre de l’antique Barcelone
Au cœur du Gothic, là ou les kabbalistes médiévaux œuvraient dans le creuset de leurs maîtres antiques, le poème : “Lorsque l’ennemi succombe” a été lâché le 9 août 2015. La place Saint-Philippe-Neri lui a servi d’écrin pour un envol riche de signes visibles au-delà de tous les regards humains. Signes donnés à notre équipée de 5 êtres soudés en un même chemin de vie. Signes en rencontres de villégiature avec Hervé, notre hôte, et Lola sa compagne. Tous médium et psychopodes d’un bouquet de lys, trône de la fiancée espérée. Tous cheminent en recherche du juste. Tous se faisant mutuellement écho, là où l’espoir s’érige.
Nos amis ont rejoint notre équipée de 5 à 19h20, portant à 7 notre petite assemblée. 7 flammes vibrantes aux gestes de ce lâché de poésie autour de la fontaine, point de rencontre de mémoires fulgurantes. La place Saint-Philippe-Neri révèle une perspective des temps, de ceux qui dansent le terrible tango des noces et des retours, des pleins et des vides, des blessures et des guérisons. Les traces de ce qui fut meurtri et pour lequel il fallut revenir et chuter encore par ignorance et orgueil, revenir encore, et réussir à être invisible comme la seconde du présent miraculeux. Sur les murs, la trace des bombes lancées par l’ignorant Franco, qui massacrèrent tant d’enfants, eux qui sortaient de l’école… Sous les dalles l’antique cimetière juif, il jouxte la synagogue du 3e siècle ressuscité de son aliénation profanatrice de ses autres ignorants du 15e siècle… Synagogue ressuscité donc, par un combattant des brigades internationales venues d’argentine, mais originaire d’Espagne et de ces familles proscrites par les fou de Dieu d’alors, ceux qui de tout temps ne savent que blesser. A elle seule cette synagogue offre, par l’histoire de ses murs, le spectacle de l’incroyable puissance, l’Ouroboros du temps et de ses spirales de feu… Elle est un message titanesque que l’on interprète au risque d’être tétanisé, catharsis à distancier : «… Seule la créativité domine l’adversité et peut, d’un malheur, modeler la richesse des prochaines civilisations… » Mes lignes versifiées : “Lorsque l’ennemi succombe”, sourcées aux Gathas de Zarathoustra ne pouvait trouver de lieu de mémoire plus approprié et s’abandonner au regard des passants, du temps, et des éléments.
L’ennemi ne peut-être vaincu qu’en combattant l’animosité, cette pensée colportée en miroir par les trois Acacias de la place rayonna du carré au cercle, par ma voix, puis par celle d’Hervé. C’est alors que deux absents s’avancèrent sur le même cheval de la pensée. Mon jeune Padawan Valentin. Sur sa tête en tourment, et aux multiples possibles d’enchantement, brillait alors le Kôf. Suivait Valentin, mon ami et poète Pablo Pobléte à qui les acacias donnèrent en silence le message de Schin. De 7 nous étions donc 9…
Où se jouera le 8, l’enceinte octogonale ? La belle Tour des chants de Salomon reste à venir ! La demeure du maître et sa fiancé : La justice ; celle que nous souhaitons en retour dans notre présent, invocation principale de nos prières… Où se jouera le 8, l’enceinte octogonale ?
Ode à notre fée tutélaire
Mélusine, Mélusine, Mélusine, ton nom de bien des cœurs est la clé
Ta sage ascendance, souvent méconnue, vibre en force et beauté
La multitude de tes descendants, par le sang et l’esprit de féérie,
Est une foule qui s’ignore, l’heure est venue d’en révéler l’égérie
Bonnes gens ici présents, vous en êtes l’armée paisible, heureuse à l’envie,
Face au soleil, osez vénérer en notre fée, le sens de toute vie
Que les demoiselles bleues dansent sous nos yeux
Elles seules sont dignes d’annoncer la présence
De celle qui, à l’amour, donna la première place
Belle fée, libère le génie du blanc et du bleu des cieux
Mélusine, tant aimée, déploie tes ailes protectrices sur notre assemblée
Que l’éternel instant donne l’étincelle du parfait présent retrouvé
Sous le regard des maîtres qui, de siècles en siècles, ont maintenu par loyauté,
Gervais Tilbury, Jean d’Arras et Couldrette, et André Breton et le grand Hugo,
Tant de héros, fameux ou inconnus
Nous, comme eux, et sans retenue
Levons l’étendard de l’imaginaire et du rêve,
Noble cause, source sublime, qui depuis Eve,
En partage, fait naître le flux,
Des richesses éternelles s’il en fut
…Permet nous, Terrible et bouleversante Mélusine, d’accorder nos gestes à tes harmoniques célestes,…
Et que nos âmes épousent enfin ce qui est juste,
Et que les honneurs reviennent à ceux qui ne trompent pas…
Lorsque l’ennemi succombe
La plus grande victoire terrasse le temps,
Et sourit au grand miroir du soleil intérieur
Elle épouse tes larmes et tes joies en torrent
Puissante héritière des diamants sans erreurs
La plus grande victoire
Nait du parfait pouvoir
Le pouvoir de tous les espoirs
Pouvoir qui nimbe la lance du destin
Pouvoir de qui s’abandonne au festin
Lorsque la main vibre, sans volonté,
Au juste rythme du cœur
Les firmaments, fiers d’aimer,
En offrent la demeure
L’Elysée ne s’ouvre qu’en absence des forcenés
Face à la table des cieux nul besoin de masquer,
Ni d’éteindre les désirs, passions souveraines
Les calculs, les pensées mesurées,
N’ont guère plus de places s’il en fut
Car le calice s’y donne à l’élu reconnu
Nos mots peuvent alors questionner
Et notre peau au fil du temps
Recueillir l’écume et le vent
Alors, seulement, l’ennemi pourra succomber
Son animosité vaincue, l’éther libéré, restitué
Sous le ciel de Mélusine, la forge de Vulcain !
Il frappe le métal de nos âmes soumises au brasier
Tumultes d’ignorances de nos ivres et fétides passions
Il frappe et explose la gangue, infernal baiser,
Il sépare le juste de l’injuste, au rythme de Sion,
Bercé par Mélusine et ses mélopées attentives, tant aimée
Il frappe, laissant fumantes, inertes, les meurtrières illusions
Hélas, toutes meurtrières de la belle et grande humanité
Il frappe, sans perdre espoir, bientôt s’effaçant le titanesque voile,
Offrira les lumières dorées des Atlantes repenties revenus de l’étoile
Alors s’imposera, de déchirure en déchirure, la gloire de tous les possibles,
Alors du métal blanc absolu et complet, victorieux mais humble,
Naîtra l’épée, par la foudre sublime, héritière d’Excalibur
Par sa puissance, fille de Durandal, par sa vertu créatrice de futurs,
Riche comme celle de Gallaad, lame forgée au soleil salomonien,
Glaive de justice en parfait retour… Spirale de joie !
Frères du temple sacré, brodez vos habits, le temps chemine !
L’éther magnifie le geste juste !
Alors que l’automne s’installe, les méditations en gloire s’épurent. Seul l’encens sait se conjuguer à la lumière, c’est ainsi que le verbe rend hommage. Du solstice à l’équinoxe, L’étincelle fondamentale c’est la promesse de l’arrêt. La boucle du temps en fait la tendre promesse. Unique passage obligé des milles et un chemins de renaissance…
Les mots ne peuvent pas manquer, même s’ils se cachent. Aux lueurs des ombres grandissantes du 21 septembre, nous avons pris la mesure de tous mouvements effectués dans le quart du temps. A FontAdam, dans le ruissellement des eaux bleues de la fontaine, le rire des espoirs régénérés se fait toujours entendre. Les limites ne s’approchent qu’au ciel et dans leurs reflets dispensés par les ondes généreuses. Nos richesses sont immenses, il suffira d’un signe pour qu’elles se dévoilent et s’offrent à nouveau dans la chambre nuptiale restaurée.
Face à un homme en son entité physique, lui le juste parmi les nations et veilleur de l’antique fontaine sacrée, face à cet homme donc, l’installation bambouesque qui porte les lignes versifiées : « Le secret, les ailes et le trône » demeure intacte… Persévérantes et droites, tendues en offrande aux vents et aux larmes du ciel, comme aux humains passants. 3 ans déjà que ce poème fut lâché en ce lieu fourmillant de merveilles, de souvenir et de rendez-vous invariables. 3 ans que ce lieu accueille, bienveillant, mes lignes inscrites en blanc sur l’ardoise noire. Quel honneur ! Tendre hommage venu souligner l’effort d’harmonie… Et parfait temps d’équilibre en l’équinoxe d’automne pour s’interroger sur les actes posés depuis le solstice… Une réponse vibre en mon cœur : « écrire doucement, un humble filet de lettres, mais résoudre dans le geste d’émettre des signes, ce que le temps questionne. »
Cette « réponse » m’atteint au terme d’un chemin découvert à « Bois-Pouvreau » (79). Ce fut notre rendez-vous de la Saint-Jean d’été de cette même année 2014. Lieu tout indiqué pour recueillir sur une onde limpide, déposée en un réceptacle de terre cuite, le rayon le plus long de l’année. Qui le sait encore ? Au solstice de juin, la flèche titanesque de Phébus,en l’instant précis où il demeure en éternité, s’il caresse la surface d’une eau, fait cette eau fluide panacée. Il y a beaucoup de la belle Isis en ce rituel, comme le grand Nerval tenta le rappel…
« Bois-Pouvreau », ce lieu, pour notre expérience de sanctification de la lumière, un bouquet de flammesrouges et bleues nous l’indiqua. La plus aimable de ces flammes sifflantes, qui toutes chuchotaient « Bois-Pouvreau », nous fut présentée en un geste d’amitié tout auréolé des cerises de mai. La Saint-Jean ne prend réellement son sens qu’en esprit de fraternité, c’est absolument ainsi que ce temps de grande et longue lumière dévoile la source, et alimente l’espoir du règne attendu des formes subtiles. Le message fraternel désignant le lieu, vint donc à nous en un tendre cadeau : un dessin à l’encre de Chine, fait il y à 12 ans d’une main passionnée. Les lignes noires sur le papier blanc, donnent à voir la fraicheur des sous-bois, là où jaillissent caressant de gigantesques mégalithes les eaux chargées des forces chtoniennes… Eaux captées par l’œuvre de moines savants, ceux de l’ordre de Grandmont. Ils œuvrèrent ici comme à Fontadam au 11ème siècle. Ici, à « Bois-Pouvreau », les Cénobites firent naître un lac source de vie, un très concret lacet d’amour, assainissant les marais, jugulant les effluves fatidiques responsables d’abominables maladies. Le lieu est donc un pur et saint objet de magie naturelle. L’artiste du dessin à l’encre de Chine, en perçu l’impérieuse énergie, Instituteur, il était venu poursuivre sa mission en ce coin de nos Deux-Sèvres, où fulminent d’impatience de merveilleux secrets d’unions flamboyantes. L’artiste/instituteur en glana les éclairs, nos Tetrakys généreux, mais oubliés, eux qui pourtant offrent sens et gloire aux héros épris d’amour et d’esprit d’aventure. Sur cela plane, l’ombre des souvenirs, quelques nuages aux formes drolatiques, libres fumées sans limite, ultime traces de Don Quichotte…
A 18h56, le long rayon de Phébus avait donné rendez-vous avec l’éternité. Ecoutant le flux et le reflux, main dans la main, l’amitié au cœur, nous perçûmes l’emplacement devant servir d’écrin au lâcher du poème. A la seconde précise la flèche de lumière frappa les lignes inscrites sur l’ardoise…Salué par l’éternité, nous mesurerions avec humilité quelle confiance il nous était fait, à nous de poser actes et gestes dans le quart temps ouvert pour être à la mesure de l’honneur et ainsi digne de revenir aux merveilles.
De juin a septembre, grâce au miracle de la flèche de lumière, habité par le souvenir de ce clin d’œil de Phebus, chaque étincelle fut mieux encore accueillie, chaque joie vénérée comme le vrai trésor, chaque sourire reçu et offert comme espoir en l’humanité… En chemin pour la confirmation de septembre à Fontadam il nous fut donné de revenir aux merveilles. L’éther magnifie le geste juste !
L’encens, le feu, l’eau et la lumière
C’est un Souffle saint du présent, sans peur,
Lorsque la lumière n’est plus informe
Messager des mystères cruciformes,
Son feu s’exprime en blancheur,
Claire beauté, volute et volupté,
Onde de vérité, danse de l’aimée
Car la vérité ne peut être nue
Nue, elle nous serait invisible
La vérité naît voilée sur nos tables,
Voilée d’images, d’émotions et de flux,
D’archétypes et de symboles,
Pain que l’on partage, digne obole
Ainsi les réalités d’en bas se meuvent
En réalité d’en haut
Et les ailes, événements du dehors,
Croisent les ailes, firmament du dedans,
Uni en un même baiser…